Bienvenue au théâtre de la démen ce...
Une pièce, plongée dans le pourpre et l’ombre
Baignée dans une singularité burlesque
Luminaires de cristal noir, Chandeliers de pierre grisâtre
Une pièce…
Immergée sous un lourd manteau de fumée noirâtre
Un dédale délicieusement malsain, caricatural
Où pleut une lumière rougeâtre, profonde et sombre
Eclaboussant par ci par là de son halo sanglant
Les visages d’une foule aussi inquiétante que fascinante
Masse informe de robots pâles et démantibulés
Visages inexpressifs et mécanisés
Un refuge figé hors du temps
Un univers moralement incorrect
Incroyablement attirant, appel irrésistible
D’un ailleurs infernal, perdu sur Terre
Voyage passionnant, par delà les abîmes
Une scène délabrée, rideaux de velours bordeaux déchirés
Ecartés de part et d’autres du plancher brun vieilli
Un long voile noir, vaporeux qui s’étend
Orné à chacun de ses coins d’un charmant masque ancien
Un décor de cabaret hanté par le spectre de l’abandon.
Pourtant, ici, le spectacle se donne toujours…
Et déjà, enveloppé par les horizons incertains
Perdu dans ces brumes artificielles
Se profile un humanoïde, élancé et désarticulé
Dont la démarche lente et déchirante
Fait claquer d’épais talons vernis
Contre le bois putréfié, dans une résonance macabre
A glacer le sang et à faire frissonner d’effroi.
Les spectateurs, foule de pantins de chair, à l’unisson
Acclament furieusement l’apparition ténébreuse
D’une seule et même voix caverneuse
Invocation pandémoniaque et mystifiante
Fanatisme immodéré pour le charismatique individu
S’avançant vers la masse grouillante qui l’honore
La silhouette indistincte se dessine peu à peu
Laissant deviner clairement sa lugubre plastique :
Un corps féminin dont les formes ne mentent pas
Mais un malaise récurrent qui la possède toute entière
Maquillage noir outrancier, miroir de ses désirs
Reflet de ce qu’elle veut être au plus profond
Reflet de ce qu’elle était, est et sera
Mademoiselle Mysteria s’éveille.
Un intense regard charbonneux, et dans ses yeux
Une multitude d’étoiles portant furie, mystère et
déchirement.
Un océan qui se déchaîne, une envie de chaos et de renouveau
Une bouche cerise, lèvres sanguines tentatrices, vampirisme
sensuel
De longs cheveux noirs ébouriffés, parsemés d’éclairs bleus,
Maintenus par une pince aux éclats d’argent
Retombent fébrilement sur ses épaules nues
Un teint livide et blafard, une intense pâleur
Dissimulant un visage de poupée faussement ingénue
Qui déguise cette soif de vices et de pêchés latents
Sous un masque d’innocence dissonant
Rien qu’une petite catin mortifère.
Mademoiselle joue un rôle, affectionne le spectacle
Mademoiselle s’amuse avec sa vie, futile.
Un râle s’échappe de sa bouche
Résolument noir et cynique
Et commence la funeste complainte
Triste monologue cinglant d’un esprit dissolu
Mademoiselle vomit sa haine et sa révolte
Crache sur ceux qu’elle exècre
Ecoutez cette mélodie grinçante et agressive !
Flot corrosif du pessimisme omniprésent qui l’étouffe
Corps et âme, Mademoiselle est empoisonnée
Un venin dévorant court dans ses veines brûlantes
Lui prêtant ivresse, souffrance et courroux.
Elixir du mal de vivre, irrémédiable
Donne à Mademoiselle Mysteria
Un gout amer qui perdure : celui d’une mort sournoise
Mademoiselle est Toxique, incroyablement dangereuse
Mais ses vêtements d’indifférence lui collent à la peau
Mademoiselle extériorise ses tourmentes
Fait abstraction de la morale et des qu’en dira-t-on
Mademoiselle provoque, enjouée
Ironie et Nihilisme émanant de ses entrailles
Mademoiselle a la nausée
Dégout de cette humanité lobotomisée et zombifiée
Vertige d’une existence fade et monotone
Mademoiselle s’époumone, hurle à en perdre haleine,
Clame les douleurs sentimentales qu’elle s’est promis
d’exorciser
Il était une fois les contes d’une Autodestruction…
Mademoiselle se libère des chaînes morales qui l’entravent
Laissant la folie qu’elle aime tant parasiter sa personne.
Elle regarde le résultat de son annihilation mentale
Avec délectation et réjouissance.
Mademoiselle veut tuer la lumière, Mysteria sombre,
Alors qu’un rictus effrayant se creuse sur son visage
Libérant le chaos sonore d’un éclat de rire frénétique
S’échappant de sa gorge grandement déployée.
Métamorphose se poursuit, Mademoiselle se déguise
Passion de sa conscience, distraction de son âme
Actes sordides et idées décadentes, aucun contrôle
Mademoiselle intrigue et attire
Fascination noire pour un personnage atypique
Jurant entièrement par la mort, pour vivre plus fort
Mademoiselle se brise, pour se sentir exister
Dans l’obscurité et la démence ambiante
Visages, figures et décors semblent se distordre
Et les lueurs blanchâtres des bougies se mouvoir
Comme une multitude de fantômes rieurs
Tandis que les sons se perdent, dissonants
Parmi les miasmes étouffants de la fumée et la sueur
Déchéance humaine et dépravation des sens
Une descente dans les limbes, promesses mortuaires
Mademoiselle s’effondre
Ses jambes lâchent sur les planches
Son visage se referme, ravale toute expression
Mademoiselle s’isole en elle-même, introversion soudaine
Ses frêles genoux se rapprochent, cachant sa tête et ses
larmes
Veloutées et cuisantes, s’écoulant sur ses joues
Le spectacle est terminé. La foule applaudit. Mademoiselle
meurt.
Mysteria n’existe pas sans sa folie.
Et Mysteria, c’est moi.